vendredi 1 août 2014

Suite de l'affaire du troupeau volé à Palol, 11 juillet 1815

Suite de l'affaire du vol d'un troupeau de moutons ayant eu lieu à Palol le 25 juin 1815.

Après la retranscription du premier procès-verbal détaillant les circonstances du vol de ce troupeau et daté du jour même de l'événement, voyons à présent ce qu'il advint de cette affaire au travers d'un deuxième procès-verbal rédigé par le maire de Palol deux semaines plus tard.

Ce deuxième texte est un peu plus lisible que le précédent et m'a permis cette-fois-ci de déterminer avec certitude les noms des deux protagonistes : Barthélémy Oliveras, métayer, et Côme Villelongue (ou tantôt Villelonga) pour le berger employé par Oliveras.


Aujourd'hui onze du mois de juillet en l'an mil huit cent
quinze avant midy.
Par devant nous Joseph Oliver maire de la commune de Palol, sont
comparu Barthelemÿ Oliveras metayer exploitant la
métairie des héritiers de Joseph Roÿros [Sert...] au terroir
de Palol, et Côme Villelonga berger à gages dudit
Oliveras lesquels nous ont fait la déclaration suivante
relativement à l'enlevement du troupeau a laine qui eut lieu
la ditte commune dans la nuit du vingt et quatre au vingt
et cinq du mois de juin dernier, par une bande de sept
hommes inconnus armés de carabines, et instrumens tranchant ;

Le dit Côme Villelongue, sçavoir berger et gardien du dit
troupeau dont s'agit, composé de quatre vingt sept betes
à laine dont vingt moutons quarante trois brebis et vingt
et quatre agneaux s'en rapporte à la declaration par lui
faite et inserée dans le procès verbal par nous, dressé le
vingt et cinq juin dernier, dans lequel sont relatés les faits,
et circonstances d'enlevement du dit troupeau à laine : et
avons ensuite interpellé le dit berger de nous dire s'il avoit
autre chose à ajouter dans sa premiere declaration
il nous a dit qu'il se rappelait qu'au moment ou il fut
détaché les brigands eurent la précaution de fermer les
sonnetes du dit troupeau, et emmenèrent le bétail droit
en Espagne.




Ensuite nous avons interpellé le dit Oliveras fermier à la
métairie appartenant aux héritiers de Joseph Roÿros de
declarer de la maniere qu'il a été reçu lorsqu'il s'est rendu
en Espagne pour retrouver le troupeau dont s'agit, sachant
que le dit bétail étoit entré dans Labajol d'après des renseignements
qu'il s'étaient procurés :

La Vajol vue depuis le col de Manrella
J'ai dit que le vingt et six  juin mil huit cent quinze il se
rendit à Labajol chez le nommé Jean Sunÿer dit Maÿ[ures]
pour prendre des informations sur l'entrée du bétail volé en
ditte commune, il a déclaré que le dit Maÿures lui avoit
répondu d'attendre un instant, et qu'il tacheroit de découvrir
les detenteurs du dit bétail : qu'un moment après le dit Maÿurès
lui dit qu'il trouverait le troupeau volé, chez le
[nom]mé Marin à Labajol ; qu'alors le declarant [..]
chez le baille de Labajol pour lui denomer [...]
le prier de faire comparaitre pardevant lui les personnes qu'il
avait découvertes avoir en leur pouvoir le sus dit troupeau
qu'effectivement comparurent pardevant le dit baille,
Marin et le nommé Mallol, qui declarerent que ce troupeau
avait été acheté par l'un deux à quatre individus [espagnols]
dont ils ignoraient le nom, et qu'en présence du baille
de Labajol les dits Marin et Mallol auraient dit au [...]
Oliveras qu'ils lui acheteroient la moÿtié du même troupeau
à lui appartenant, et qu'ils lui en payeroient le [...]
après lui avoir fait sentir que s'il ne convenoit pas  avec [eux]
il n'en retirerait rien, et alors le dit Oliveras nous [avoue]
qu'il se vit force de vendre sa portion de troupeau
à dix francs par tête, dont il ne lui fut paÿé à ce [jour]
que quarante piessettes d'Espagne, et que le dit Marin et
Mallol se retinrent la restante somme en lui disant qu'il
lui volerait en chemin et l'ayant renvoyé avec promesse
qu'ils lui payeroient la somme restante a toute autre occasion,
et il nous a dit n'en avoir plus rien reçu.
C'est la declaration du dit Oliveras, dont lecture [puis]
par nous faite, et interpellé de signer, a dit ne sçavoir.

[signature du maire]
Oliver

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Carte de Palol à La Vajol

L'affaire semble prendre une mauvaise tournure pour le pauvre métayer de Palol, Barthélémy Oliveras. Bien qu'il ait retrouvé son troupeau à La Vajol juste de l'autre côté de la frontière, près de Las Illas, les deux brigands Marin et Mallol semblent déterminés à l'arnaquer en lui rachetant ses bêtes pour une somme modique et dont il ne verra même pas la couleur.  Ces derniers semblent de surcroît bénéficier de la complicité du maire (baille) de La Vajol, sûr de son impunité, puisqu'en Espagne. On aurait pu naïvement penser qu'il existait des liens plus forts entre catalans des deux côtés de la frontière mais, dans cette affaire, ce n'est manifestement pas le cas et les deux brigands n'ont aucun scrupule à dévaliser des paysans du Vallespir avec qui il est plus que probable qu'ils soient apparentés (même de manière lointaine) si tous les protagonistes de cette histoire sont vraiment de la région.
Pour rappel, la commune de Palol est à l'époque limitrophe au sud avec la commune de La Selve, elle même limitrophe avec celle de Las Illas, qui mène à Maçanet de Cabrenys et La Vajol, de l'autre côté de la frontière.

Note sur la carte : On voit en haut le pic de Miralles, situé à Palol, et en bas, le point rouge désignant La Vajol. L'actuelle route D13f n'existait pas, mais le chemin de Palol à La Selve oui (ainsi qu'une multitude d'autres petits chemins) et il était facile après de rejoindre le chemin vers Las Illas (que reprend l'actuelle route) et de se diriger vers La Vajol.

Source : Archives municipales de Céret Photos documents : Fabricio Cardenas (CC-BY-SA)
Photo La Vajol : Grondin (CC-BY-SA) via Wikimedia Commons
Carte : OpenStreetMap (CC-BY-SA

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